Suite à mon dernier article, je réponds à quelques objections.

1/ Si internet n’est qu’un média, il est absurde de se demander s’il est une démocratie. La question préliminaire est donc de savoir si internet est plus qu’un média. C’est le sujet de mon article. Je discuterai plus tard de la démocratie internet, une fois ce premier point réglé. De même, je discuterai plus tard de l’éventuelle constitution adaptée à ce nouveau territoire.

2/ Qu’internet deviennent un territoire ne signifie pas que les autres territoires disparaissent. L’Angleterre n’a pas disparu lorsque l’Amérique s’est déclarée indépendante. Les patates continueront de circuler sur les territoires physiques. En tout cas pour longtemps. On peut toutefois imaginer une circulation de la matière sous forme de code à exécuter – c’est un peu ça la vie d’ailleurs.

3/ Sur internet circulent déjà des produits de consommations : musiques, livres, films, jeux… L’argent y circule aussi. On peut déjà imaginer de travailler sur internet, de se faire payer sur internet, d’acheter sur internet. C’est mon cas. bonWeb, mon entreprise, est basée en France mais elle pourrait se déclarer uniquement sur le web, recevoir sur Paypal l’argent qu’elle génère sur le web, sans jamais rencontrer les institutions ordinaires. Des entreprises comme la mienne peuvent déjà n’exister que sur le web.

4/ Internet n’est pas un territoire mais un réseau. Oui, bien sûr. Internet est fait de lignes et de points. Il est discontinu. Mais la matière aussi est discontinue, il suffit de la regarder à l’échelle atomique pour la voir comme un réseau. Nous avons la chance de voir internet de très près, d’y être plongé, voilà pourquoi nous n’en voyons pas la surface. Mais lorsqu’on regarde une carte d’internet, qu’on la réduit, les points et les lignes s’effacent, ils dessinent une carte.

5/ Les nuances entre nations ou états sont sans doute très importantes mais ne changent pas grand-chose à ce dont je parle. C’est bien sûr un point de vue. Les définitions sont faites pour être changées sans cesse. Wittgenstein s’est battu pour faire accepter cette idée. Je me suis expliqué plusieurs fois à ce sujet, notamment dans ma discussion sur l’interdépendance.

6/ Les habitants du territoire internet, c’est nous qui y discutons, qui y travaillons, qui nous y amusons… et peut-être déjà des bribes de conscience artificielle dont nous sommes incapables de percevoir l’existence. Elles marchent peut-être à la surface d’internet, cette surface que nous ne pouvons pas percevoir. Les IA pourront s’approprier internet qui, par cette simple possibilité, dépasse le cadre de n’importe quel média. Cet argument peut paraître déplacé pour beaucoup mais des centaines de laboratoires essaient aujourd’hui de créer des IA. Ce n’est pas une utopie. Dans cette perspective à long terme, une perspective post-humaine, internet est un territoire comme un autre.