Depuis la sortie du Peuple des connecteurs, plusieurs personnes, dont Éric Seulliet, m’ont signalé la ressemblance entre les connecteurs et les créatifs culturels. Je n’avais jamais entendu parler d’eux. Les Échos ont publié une définition des créatifs culturels :

Après les « bobos » voici les « créatifs culturels », férus de développement personnel et d’ouverture aux autres, mais menacés par le retour aux communautarismes.

Je ne sais pas si les connecteurs arrivent après les bobos, mais pour le reste cette définition est valable. Les connecteurs sont ouverts aux autres puisqu’ils supposent que nous allons vers une société où nous nous auto-organiserons en interagissant les uns avec les autres.

Nous ne formerons pas pour autant de nouvelles communautés puisque la richesse de nos interactions dépendra de la diversité de nos caractères. Nous devons être ouverts aux autres sans chercher à leur ressembler. J’ai parlé dans le livre du devoir de différence. Nos pires ennemis sont les communautaristes de tout type (politiques, religieux, nationalistes…). Et je vois mal comment, à moyen terme, nos visions du monde opposées éviteront la confrontation violente.

L’article des Échos liste les caractéristiques des créatifs culturels. Quelle est la position des connecteurs ?

Anti-pubs (mouvement mis en évidence par No Logo de Naomi Klein). Je ne crois pas que les connecteurs soient antipubs, mais plutôt insensibles à la pub. Ils choisissent en comparant les offres sur le web, en s’informant, en dialoguant dans les forums. Une pub peut les intéresser si elle est informative.

Écologistes Pour les connecteurs, tout est connecté, le culturel comme le naturel. Une infime pollution à un endroit du monde peut créer une catastrophe à l’autre bout du monde. Ne pas être écologiste n’a plus aucun sens aujourd’hui.

Citoyens Les connecteurs sont de vrais citoyens, car la société dépend exclusivement de leur engagement et non plus de celui des États qui perdent toute capacité d’action dans un monde devenu hypercomplexe.

Féministes Les connecteurs partagent tous les combats humanistes, mais ils se situent au-delà : ils ne défendent pas plus les femmes que les enfants, ils défendent tout le monde, toute chose, même les éventuelles machines intelligentes qui sortiront bientôt des laboratoires.

Spiritualistes Les connecteurs sont athées mystiques, ils baignent au cœur d’une intelligence collective, ils croient en l’homme, en notre capacité de nous dépasser. Mais les connecteurs ne sont pas nécessairement adeptes des médecines parallèles, de yoga ou de sophrologie. Ils s’appuient sur la science, la technologie. Ils ne rejettent pas ce qu’ils ne comprennent pas. Ils cherchent à comprendre. Les connecteurs sont matérialistes, le matérialisme n’exclut pas la spiritualité. Leurs prises de position se justifient scientifiquement. Les créatifs culturels sont peut-être des connecteurs spontanés. Je suis devenu connecteur par logique, ils le sont devenus intuitivement, naturellement.

Antimondialistes Les connecteurs sont plutôt altermondialistes. La mondialisation est déjà consommée, il faut maintenant que ce soit une mondialisation des hommes, pour les hommes libres, et non seulement pour le business. Les connecteurs sont des libéraux au sen de liberté individuelle et non d’économie de marché.

Faut-il alors appeler les connecteurs des créatifs culturels ? Non. Créatifs culturels est une appellation descriptive et non dénominative. Nous ne nous rassemblerons pas derrière une dénomination, derrière un constat, mais derrière un projet de société, d’une société ouverte à toutes les interactions et non refermée par des régulations arbitraires qui freinent notre libre expression et notre créativité.