Vendredi 1er, Sète

Sète
Sète

Vendredi 1er, Balaruc

Baignade interdite
Baignade interdite

Dimanche 3, Sète

Exposition Marquet. La lumière du Midi, les vibrations de la mer et du ciel, avec des premiers plans qui hachent, tantôt des bâtiments, des arbres, des persiennes entrouvertes. Marquet me donne toujours envie de dessiner. Je suis parti à Tunis à cause de lui il y a vingt cinq ans. Il me remplit, me sature de beauté, me gonfle et me donne l’impression d’être au bord de l’explosion tant l’émotion esthétique est puissante, sans que je puisse affirmer qu’elle soit agréable. Elle est au-delà, peut-être avec un pas vers la douleur, ou la frustration, un sentiment d’impuissance à être aussi léger. S’arrêter, voir, capturer, ne se préoccuper de rien d’autre.

J’aimerais écrire comme Marquet peint, sans arrière-pensée, sans objectif, pour le plaisir du moment. Je suis dans ses instants, dans ses heures glorieuses, c’est à pleurer comme si je le voyais renaître, comme si je sentais sa respiration et étais dans ses yeux éblouis par les reflets à la surface de la mer et des toits écrasés de soleil. Je l’imagine satisfait de lui, souriant après son travail, calme, heureux d’avoir aussi merveilleusement vécu.

Je ne vois pas d’autre forme que le carnet pour rivaliser avec la peinture devant paysages. La poésie est trop savante, trop codifiée même quand elle s’autorise tout. Seule la prose libérée d’ambition peut atteindre à la légèreté de l’instant. Ce matin, le soleil sur la presqu’île, avec un front noir au-dessus d’elle, qui l’a dépassée puis l’a brouillée de trombes d’eau.

Ne pas penser à ce matin, c’est encore le matin, un peu plus tard, dans une des salles du Musée Paul Valéry, avec à travers les baies vitrées, disposées de part et d’autre d’une vue de la baie de Naples et d’une autre de Venise, les arbres balayés par le vent d’ouest et au-delà la mer du même qui gris que le ciel.

Je me translate à l’autre bout du banc, face à d’autres vues de Venise, à des bateaux de guerre, un voilier à voiles jaunes qui va et vient d’une toile à l’autre, des marins sur les quais, des femmes élégantes, des campaniles et des coupoles. Les Marquet se précisent quand je m’en éloigne, mais je le trouve à son plus haut dans ses minuscules aquarelles, ses esquisses, davantage dans l’instant, dans la vie, dans la nonchalance de celui qui n’œuvre que pour le plaisir. Pas besoin de s’éloigner, elles se donnent comme les pages d’un livre, à la distance de lecture et d’écriture, ou de dessin.

Quand je prends du recul, j’entre dans l’intelligence du peintre, de celui qui a assez de distance avec son travail pour se mettre à la place du spectateur. Non, le direct, l’immersion brute dans la création, dans ses imperfections. Écrire sans penser au lecteur, ne plus écrire pour être lu, ne plus écrire que pour jouir, ne plus écrire avec cette distance qui implique le cynisme.


Il y a la vue d’une ville, avec des toits verts de pluie, un arrière plan de nuages. Les toits étaient-ils verts ? Ou le vert une métaphore ? Des toits verts de pluie, il me semble que les toits seront dorénavant verts dès qu’il pleuvra, le gris doublé d’une couche luisante qui en altérera la couleur comme le vert de gris les bronzes.


Arrêt dans la salle Paul Valéry, avec une perspective sur le cimetière marin, puis le théâtre de la Mer, puis la mer elle-même, balayée de trains d’énormes vagues parallèles à la côte, qui défilent, amples, creuses, méchantes, faisant onduler le paysage jusqu’à me donner le vertige. Des gerbes blanches jaillissent à l’extrémité droite du brise-lame, côté du phare vert, peu habitué à être fracassé sur cette face. Et les cyprès se couchent, se redressent, devant les tombes impassibles, étagées face à la tourmente dont elles ne manquent rien.

Musée Paul Valéry
Musée Paul Valéry

Dimanche 3, Villeveyrac

Les champs, à vélo
Les champs, à vélo

Lundi 4, Balaruc

Première neige sur les Pyrénées. Dix semaines depuis la fracture. Je suis encore incapable de courir, mais je marche presque normalement. Tour de l’étang en gravel dans la transparence ultra légère. Après, séance chez Olivier, qui me dit que je suis opérationnel.

La neige
La neige

Mardi 5, Montpellier

Attente de mon rendez-vous avec l’orthopédiste, et comme par hasard j’ai mal aujourd’hui, mais surtout au genou. Mon corps s’est enroulé autour de la douleur et il lui reste à se déplier.

Au sixième, baie vitrée du sol au plafond et moi contre elle avec la possibilité ressentie de tomber. J’ai de plus en plus le vertige, petite perversion de le provoquer.

Le diagnostic d’Olivier est confirmé, avec une petite nuance : « l’appareillage » provoque peut-être ma douleur musculaire à la cuisse droite, le muscle se blesserait en frottant sur les vis et les plaques. Si c’est le cas, il faudra me retirer ces ferrailles. Et puis il y a le risque de nécrose du col du fémur, qui peut survenir jusqu’à deux ans après l’accident.

Mercredi 6, TGV

La nuit mon fémur pulse, ce matin l’articulation grince. Parfois je me dis que c’est pour toujours. Ça me déprime, surtout quand je monte à Paris pour mon pseudo travail d’écrivain obscur. Sensation d’impuissance après la remise des prix. De n’être qu’une fourmi. Je suis dans cet état quand j’oublie que j’écris pour jouir et bascule dans écrire pour les autres, pour qu’ils m’aiment ou me détestent, mais qu’ils réagissent, comme si tout cela pouvait avoir un lien avec la beauté, non ce n’est qu’une question de résonnance avec le contemporain déjà dépassé, avec les soucis, avec les actualités. J’ai beau le savoir, j’en souffre tout de même. Il y aura les amis, les rencontres, les rigolades, reste une blessure plus profonde que celle de mon fémur.

Mourir dans un train. Dans un avion. Se trouver mal et succomber en mouvement. Appel du contrôleur pour un médecin. Un jour, la course se termine, souvent inopinément.

Un ami me dit que mon roman n’est pas davantage mis en avant parce qu’il parle de la guerre d’Algérie, un sujet toujours tabou. Une chose est sûre, la plupart des critiques ne parlent pas de la dimension guerrière du texte, mais après tout il ne s’agit pas de mon sujet, seulement de mon fil rouge.


Une idée avec les copains. Écrire un texte, pourquoi pas un roman entier, avec les trois cents mots les plus utilisés dans les recherches Google. Titre proposé par Hubert : L’appauvrissement.

Montmartre
Montmartre

Jeudi 7, Paris

Nuit infecte dans mon studio pollué par un visiteur fumeur. Odieuse agression. Impression d’avoir dormi dans un antique compartiment de train. Je ne sais pas combien d’années il faudra pour l’air redevienne respirable.


Un enfant de 4 ans connaîtrait 1 750 mots. Un élève de troisième en serait à 3 500. Mais comment connaître les mots les plus utilisés aujourd’hui ? Je joue avec Google Trends et découvre que les mots « Internet » et « Amour » suivent plus ou moins la même variation.


Conversation saisie dans la rue. « Les gens à la campagne vivent encore comme avant. » Parfois, j’ai envie de me retourner et de donner des claques.

La tour
La tour

Vendredi 8, Étampes

Belle soirée hier soir à Pithiviers, un public nombreux, des lecteurs qui ont témoigné de leur relation paternelle, un accueil chaleureux de Fabienne la patronne de la librairie Gibier. Je trouve là plus de chaleur humaine que sur le Net. Nous n’étions pas en train de nous exposer, de rechercher l’attention, mais juste de passer un moment ensemble. Et puis j’ai retrouvé de vieux amis, qui ne sont pas étrangers à ma façon d’écrire et de penser, qui ont même énormément contribué à ce que je suis, et qui m’ont aidé à être un humain un peu meilleur.

Vendredi 8, Brive

Monstrueuse foire du livre. Je suis coincé entre deux vedettes, sans éveiller la moindre curiosité. Rien ne vaut le tête-à-tête avec les lecteurs dans le confort douillet d’une librairie. Je n’écris pas des livres pour faire le singe dans une cage.


« Plusieurs personnes m’ont dit que les passages les plus intéressants de Mon père, ce tueur étaient ceux où je parlais de moi. Qu’es-je donc de si intéressant à raconter à mon propre sujet ? » voilà qui pourrait être le début d’une sorte de roman, et n’est-ce pas le sujet de mes Ravissements ?

Brive, la nuit
Brive, la nuit

Samedi 9, Brive

Oppressante foule qui ne s’intéresse qu’au vu à la TV. Je devrais me lever et partir, mais je regarde les gens, ou les moutons, je ne voudrais pas les reduire mais difficile de faire autrement. Heureusement, il y a de belles rencontres. Des amitiés qui se tissent.

Dimanche 10, Brive

De la fascination pour les vedettes. Je ne me l’explique pas. Pourquoi je viendrais me faire signer un livre d’une personnalité vue à la TV ou d’un auteur que j’aime ? Pour lui dire que je l’apprécie, peut-être, pour lui faire plaisir en lui disant ce que je pense ? Moi, qu’un lecteur me parle me fait plaisir. Mais eux, pris d’assaut ? Ont-ils encore besoin de ces effusions ? Ou peut-être comme moi apprécient-ils les à côtés, retrouver les amis.

Dimanche 10, Paris

Pierre me dépose gare de Lyon. Je me dirige vers une brasserie où j’ai mes habitudes pour attendre mon train et je la trouve vendue, cadenassée par une équipe directoriale chinoise qui ne maîtrise pas le français. Je fuis devant ce Paris qui m’échappe, tombe face à un Starbuck où malgré moi j’entre parce que j’y serai plus confortable que dans les brasseries du boulevard Diderot. J’ai presque honte.


Je ne peux pas encore écrire mon histoire de femme, alors pourquoi ne pas écrire ma propre histoire, parler de moi, en osant la fiction ? Ou reprendre Adam, mon récit de SF laissé en plan il y a quelques années et dont parfois des lecteurs me demandent la suite. Mon projet était de créer un récit où le mystère ne cesse de grandir, sans jamais approcher d’une résolution, allant toujours plus large, un peu comme une série pas destinée à s’achever, sinon brutalement, par un jeté d’éponge.

Lundi 11, Balaruc

Mer et garrigue
Mer et garrigue

Mardi 12, Sète

Sète, les Beaux arts
Sète, les Beaux arts

Mercredi 13, Balaruc

Quand j’étais à Brive, parmi les auteurs, je me sentais énergisé, avec des envies d’écrire encore et encore, et puis de retour à la maison, je ne retrouve plus cette énergie. Quel intérêt d’écrire sur moi ? Pourquoi les gens s’intéresseraient à ma vie ? Pourquoi on s’intéresse à une vie ? Sans doute parce qu’elle nous permet de la vivre par procuration et d’apprendre à travers elle. Alors toute vie mérite d’être racontée, la mienne comme une autre, et pourquoi pas elle puisque je la connais mieux que les autres. Michon a écrit des vies minuscules parce que ses personnages n’avaient pas raconté la leur. Peut-être raconter la mienne sous une multitude de perspectives, comme autant de vies minuscules. Mes vies minuscules.

Les vignes
Les vignes

Jeudi 14, Balaruc

Je conduis les enfants à Sète et j’écoute les news sur Culture. Mort de Poulidor, l’exact contemporain de mon père, son idole et le mien quand j’étais enfant, comme si mon père mourait une seconde fois, et mon enfance avec. Et tout de suite après Boltanski parle de la mémoire, des vies qui s’effacent et qu’il cherche à retenir. Il me donne envie de m’attaquer à la mémoire de moi-même, sans que cela ne soit redondant avec ce carnet, lieu de pensées plutôt que d’autobiographie. Et Boltanski de dire de Poulidor : « C’est un je me souviens. » Et peut-être que plus personne ne pourra être Poulidor alors que nous pouvons tous être Rousseau. Laisser la possibilité d’un Je me souviens pour toutes les vies, toutes passionnante et insignifiantes.

Les oiseaux
Les oiseaux

Vendredi 15, Balaruc

J’ai tenté d’écrire sur moi, sur ma vie, des souvenirs remontent comme quand j’écrivais sur mon père, des oubliés s’imposent, peut-être réinventés, mais je piétine, submergé par les possibilités, par les récits entrecroisés, inconcevable d’écrire chronologiquement. Et puis il y a l’histoire de cette femme qui me hante.


Premier coup de froid de l’hiver. Un petit 3°C ce matin, les doigts qui piquent. Et les copains de Floride m’envoient des photos de soleil. JP celle de l’Aligaror de Mark’s Fish Camp. « Your old friend. »

Dimanche 16, Balaruc

Regate
Regate

Lundi 17, Balaruc

Matin
Matin

Lundi 18, Balaruc

La lumière. Une seule envie sortir, rouler, respirer, explorer. Toute l’énergie que je mettais dans la littérature je la mets dans le vélo, parce que le retour est immédiat, la satisfaction première. Alors je tente d’unir les deux, d’écrire sur le vélo, de tenir un journal parallèle. Pourtant il y a un manque, comme si je laissais passer quelque chose, une dernière chance d’entrer dans une œuvre, et je crois savoir où elle se niche, en moi-même, dans mon existence, comme elle l’était en Montaigne ou en Rousseau.

Mardi 19, Balaruc

Je n’aime pas ne pas écrire. J’ai souffert de ce mal tout au long de mon séjour en Floride. Pourquoi ne pas me contenter de profiter ? De n’utiliser l’écriture que comme une source de joie égoïste ? Je n’ai pas terminé mes Ravissements que j’ai déjà besoin de plonger dans autre chose. Sinon, je suis en état de manque.


Furieux contre les profs qui maltraitent les enfants, font tout pour les décourager, comme s’ils ne voulaient pas qu’ils réussissent mieux qu’eux-mêmes. On ne devrait être autorisé à enseigner qu’après au moins dix ans dans la vie active. Passer de l’école à l’enseignement est un non-sens. On enseigne quoi ? On a vécu quoi quand on reste à l’école toute sa vie ?

Pêcheur
Pêcheur

Mercredi 20, Balaruc

Matin
Matin

Jeudi 21, Balaruc

Je fais du vélo, je vois des copains cyclistes, je discute vélo, je lis vélo et finalement j’écris peu sur le vélo, encore incapable d’imaginer une forme littéraire, un fil rouge, autre que celui du journal de mes promenades. Je me heurte à un mur, à une évidence, écrire sur ce que je vis, ou imaginer une pure fiction, une affabulation dans une lointaine galaxie. Je ne conçois aucun entre-deux. Alors je pars pédaler.

Vendredi 22, Balaruc

Finalement, je prends un grand plaisir à raconter ma virée d’hier à vélo, impression d’être dans le juste, dans la littérature qui ne se regarde pas le nombril, ni qui ne cherche à distraire à tout prix. La forme est là, évidente, dans la modalité du blog, presque à l’ancienne désormais. Je passe la suite de la journée à préparer de nouvelles balades qui seront à leur tour prétexte à récits.

Samedi 23, Balaruc

Mauvaise nuit. Me dit que je passe à côté de la littérature, et quand je relis mon texte d’hier, me dit que j’y suis. Je n’arrive pas à être là où le public est, là où on attend les auteurs, peut-être parce que je suis moi, parce que je ne cède pas. Et alors à quoi bon mon éloge des libraires puisque mes textes les plus importants n’ont aucune chance de se retrouver chez eux ? Un éloge pour les autres, pour ceux qui restent dans les anciennes formes.

Le vélo est techno, aventure, sport, camaraderie, esthétique. Il est littérature. Il est de notre temps, en phase avec notre raz le bol. Il est ultracontemporain. Ce que je vis à vélo est neuf. Avec les vélos modernes, les GPS, les systèmes cartographiques numériques, les sites de partage de traces, c’est une nouvelle façon de voir le voyage, d’explorer les paysages, de partager du temps entre amis. Une alliance incroyable de tout ce que j’aime. Une pure matière à littérature.


Je me pleins de ne pas écrire, pourtant j’ai déjà publié 800 000 signes sur le blog en 2019 et mes Ravissements avoisinent les 160 000 signes, une année qui dépassera sans doute le million de signes, pas si mal au kilo. Reste que tout cela est fractionné, ne s’inscrit dans aucune unité, et c’est peut-être cela la forme d’aujourd’hui, les saga contemporaines sonnent faux. Mais pourquoi j’aimerais en écrire une ? Pourquoi j’aimerais me perdre en l’une d’elles bien qu’aucune ne tienne la distance ? Parce qu’elles continuent d’être consacrées. Je ne vois pas d’autre explication. Je voudrais faire comme les autres, rien de pire pour un artiste. Un fond de nostalgie.

Dimanche 24, Balaruc

Belle sortie gravel par un temps maussade entre pluie et rafales de mistral, passages inondés, pieds vites trempés, mais récompense à la fin quand le soleil couchant se glisse sous les nuages et embrase les platanes. Je suis bien dehors, j’y suis mieux que devant mon écran, et je n’ai plus envie d’écrire que pour mieux me pousser dehors.

Sortie gravel
Sortie gravel

Lundi 25, Sète

Sète
Sète

Mardi 26, Balaruc

Sublime sortie dans les vignes, explosion des couleurs d’automne. Le projet de répéter ces mini aventures, de collectionner des voyages dans mon jardin.

Mercredi 27, Balaruc

La sagesse serait de me taire, mais j’ai envie de crier, et tous les autres crient, et personne n’est entendu, alors la logique serait de me taire, mais il est bien connu que les homo sapiens ne sont pas rationnels, et je n’échappe pas à la règle. Quand j’ouvre une fenêtre sur le web social, j’entends des cris comme échappés d’un asile de fous avant l’invention des tranquillisants. Si le monde va mal, c’est là, quand on ouvre la fenêtre et qu’on voit à l’intérieur du cerveau social, et qu’on découvre que chacun des neurones fait comme s’il était immortel. Fierté de pisser dans son coin. Incapacité de pisser sans le dire. Je suis malade, au moins je le sais. Ça ne me donne pas beaucoup d’avantages, au contraire. Nous serions grands en tant que société si nous pouvions faire silence. Un mois de silence médiatique pour sauver le monde. Mais nous sommes petits, minuscules, des cancrelats prétentieux. Avec ce défaut de vénérer les artistes idéalistes. Il a bon dos l’idéal quand on n’a pas à récurer les chiottes des autres, ni même les siens, mais désormais c’est la planète entière qu’il faut récurer à cause de ces conneries. Mon seul mérite retenir un tel texte, l’enterrer dans mon journal, ne pas en faire un sujet de conversation.


Peut-être que le bateau sombre et que tout le monde crie de panique dans l’espoir d’être sauvé. Mais sauvé par qui puisque nous sombrons tous ensemble ? Il y a le fantasme d’une élite d’élus, qui avec leurs millions échapperont au massacre. Et tout le monde veut en être, alors ça crie aussi pour se faire remarquer, pour gagner son ticket sur l’arche de Noé. Moi, déjà petit, je n’aspirais qu’à la postérité. Mais quelle postérité reste possible dans un monde en ruine ? Vraiment, à part faire du vélo, je ne vois plus ce qui me reste à faire.

Vendredi 29, Balaruc

Ce matin alors que je rentre de conduire les enfants au collège/lycée, je me dis que j’étais bien quand j’étais en convalescence, protégé dans ma bulle, sans la moindre responsabilité. J’ai vécu une parenthèse qui a posteriori m’apparaît agréable, peut-être parce qu’elle m’a inspiré mes Ravissements, un texte que je serais bien incapable d’écrire aujourd’hui, un mois plus tard.


En littérature, faire un pas vers les lecteurs ne m’a jamais apporté de satisfaction, alors faire uniquement ce que j’estime nécessaire pour moi. J’ai souvent besoin de me répéter cette promesse.


Quand je vois des photos des auteurs du XIXe ou du début XXe à mon âge, ils me font penser à des vieillards. Je me dis que dans cent ans les cinquantenaires me trouveront un look de vieux.

Samedi 30, Montpellier

Montpellier
Montpellier