Si le référendum européen s’est joué sur internet, c’est en partie grâce à Étienne Chouard. Aujourd’hui, il poursuit son combat. Son slogan :

Ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir.

Je ne peux qu’applaudir. Quand le pouvoir définit les règles du pouvoir, il n’y a plus de place pour le dialogue politique. Cet article fait suite aux commentaires postés par Étienne et d’autres lecteurs suite à mon article De la démocratie Internet.

Sur son forum, sur un mode collaboratif, Étienne cherche à écrire une nouvelle constitution, une constitution qui viendrait des citoyens et qui limiterait le pouvoir des élus. Son initiative doit être encouragée.

1/ Elle démontre que d’autres constitutions sont possibles et, surtout, que la notre est temporaire, approximative, imparfaite. Ce travail critique est indispensable. Il ne faut pas avoir peur de le faire en partant sur des bases neuves. Le replâtrage constitutionnel n’a que trop duré.

2/ En essayant d’écrire une nouvelle constitution, Étienne et ses collaborateurs découvriront de nouvelles idées constitutionnelles. C’est en écrivant qu’on devient écrivain. À un moment donné, il faut cesser de critiquer et construire. C’est ce que fait Étienne.

3/ Certains commentateurs disent que le travail d’Étienne est trop technique. Ce n’est pas parce qu’on n’est pas un professionnel qu’on n’est pas compétent. J’ai écris un article à ce sujet en évoquant le crowdsourcing.

4/ Faire écrire une constitution par les citoyens qui en éprouvent le désir participe d’une pratique bottom-up. C’est le mode d’action le mieux adapté pour résoudre un problème complexe. Bien sûr, au final, la constitution résultant de ce travail s’imposera à tous par le haut de l’État. Elle nous ramènera au mode top-down.

5/ Étienne met en évidence les limites de la démocratie représentative, notamment la tendance des élus à verrouiller leur position. Si nous restons dans un mode représentatif, ce que je ne crois pas nécessaire, nous devons séparer le pouvoir exécutif, détenus par les élus, du pouvoir constituant, qui doit être détenu par les électeurs. Aujourd’hui, ces deux pouvoirs appartiennent aux élus. Ils définissent eux-mêmes la démocratie qu’ils dirigent. Ce n’est ça la démocratie.

6/ On oppose à Étienne que sa constitution bottom-up ne sera pas l’œuvre de tout les citoyens, donc qu’elle ne sera pas représentative. Le problème n’est pas là. Cette constitution doit être démocratique au sens où tous les gens qui le souhaitent, même les élus, peuvent y participer. La porte doit rester ouverte. La franchir ne nécessite aucune caution sinon de s’intéresser au sujet et d’avoir l’envie d’y consacrer son temps. Nous ne devons pas être hypocrite et croire qu’un tel travail constitutionnel peut être l’œuvre de dilettantes. Celui qui veut jouer au foot, même en amateur, doit un peu s’entraîner.

7/ D’après certains, Étienne n’aurait aucun pouvoir, donc aucune chance de changer les choses. Au contraire, il a un pouvoir immense. Nous avons un pouvoir immense. Sur le web, sur Agoravox notamment, passent beaucoup d’influenceurs, beaucoup de gens qui propagent les idées. Nous vivons à l’époque du buzz marketing. TF1 n’est plus tout puissant. Les politiques sont en train de le comprendre voilà pourquoi ils se démènent sur le web. Nous sommes à l’époque du bottom-up. Le buzz est un amplificateur du bottom-up.

Le projet d’Étienne va dans le bon sens, il démontre à lui seul que la démocratie participative est déjà à l’œuvre. Il y a juste une chose à ne pas oublier. Une fois la constitution écrite sur un mode bottom-up elle s’imposera top-down. Mais elle doit maintenir en vie le bottom-up qui lui a donné naissance. La nouvelle constitution doit être dynamique, en perpétuelle évolution. Elle sera par nature écrite pour être réécrite.